Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome VIII, 1820.djvu/21

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totalement oublié et prisonnier pendant quarante-neuf ans, il subit depuis sa tendre jeunesse jusqu’à l’âge le plus avancé, toutes les horreurs d’une détention arbitraire et barbare. Chargé de chaînes, il était seul avec Dieu et son innocence ; jamais il n’avait offensé personne ; jamais il n’avait enfreint les saintes lois de l’humanité, et son unique tort venait de sa naissance ; car il avait le malheur d’être neveu d’un autocrate auquel il importait de détruire en Russie le système des apanages, et qui, pour s’attribuer un pouvoir unique, ne ménageait pas même ses plus proches parens. Malgré ces considérations, le gouvernement ne put se résoudre à lui accorder grâce pleine et entière, et à rendre au monde celui qui, comme sorti de la tombe, lui aurait été entièrement étranger. Il ordonna seulement de le délivrer du poids de ses fers, et de donner plus d’air, plus de clarté à sa prison. Sans doute ce fut alors que Dmitri, abattu par de longues souffrances, répandit les premières larmes d’attendrissement et de gratitude, en se trouvant débarrassé de ses chaînes, pouvant au moins jouir de la vue du soleil et d’un air plus pur. Il était détenu à Vologda, où il termina sa vie. Son frère, le prince Jean, mourut moine quelques années