Page:Karamsin - Histoire de l'empire de Russie, Tome XI, 1826.djvu/162

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femme illustre, par les qualités de son âme, et sa destinée extraordinaire ; la fortune vint la chercher, lorsque privée de son père et de sa mère, elle gémissait dans un triste isolement ; bien qu’élevée et chérie par Ivan, elle fut vertueuse ; première Souveraine Régnante en Russie, elle s’enferma jeune encore dans un couvent ; pure devant Dieu, elle est entâchée dans l’histoire par son alliance avec un cruel ambitieux, à qui elle montra, quoiqu’involontairement, le chemin du trône, aveuglée par l’attachement qu’elle lui portait, et par l’éclat de ses vertus apparentes ; elle ignorait ses crimes ou ne voulait pas y croire. Boris pouvait-il dévoiler les secrets de son âme cruelle à un cœur si saintement pieux ? Il ne partageait, sans doute avec sa tendre sœur, que de bons sentimens : il se réjouissait avec elle, des triomphes de la patrie (143) ; avec elle il gémissait sur les malheurs dont cette patrie était accablée ; il lui confiait ses grands projets d’éclairer la Russie ; il se plaignait peut-être de l’ingratitude des hommes, et des complots qu’il supposait tramés contre lui : fantômes vengeurs de sa conscience agitée !