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yeux qu’autant qu’ils prenaient la défense des faibles, des opprimés, des déshérités de la vie, qu’ils se faisaient les avocats de ceux auxquels on refusait tout droit. Ils perdaient sa sympathie aussitôt qu’ils devenaient triomphants, qu’ils se faisaient persécuteurs, vengeurs, oppresseurs, soufflant la haine et la discorde. Pendant toute sa vie, elle donna ses préférences au régime républicain qui seul lui semblait pouvoir assurer le bonheur des masses et lui paraissait le plus propre à satisfaire les vœux de toutes les classes, mais elle ne fut jamais vraiment un écrivain politique. Nous avons déjà eu l’occasion de parler plusieurs fois[1] ailleurs, des prétendues trois périodes de sa carrière littéraire, répétées dans toutes ses biographies, de ces trois malheureuses phases, auxquelles ne peut échapper aucun écrivain, aucun compositeur, aucun artiste, et dont la seconde serait pour George Sand son « entraînement subit pour les idées sociales » et la troisième son « retour à l’art pur et doux ». C’est tout aussi rebattu que faux. On dit aussi fréquemment qu’elle a presque toujours écrit sous l’influence de tels ou tels inspirateurs, et qu’on peut en suivre les traces dans toutes ses œuvres. On serait cependant bien plus juste et plus près de la vérité si l’on disait, que depuis l’époque où elle avait soulevé les sceaux malpropres de la sœur converse Hélène, dans l’unique but de venir en aide à cette humble servante, objet de répulsion du couvent, jusqu’en 1870-71, moment où elle rompit avec ses anciens amis et blâma les crimes de la Commune aussi chaudement qu’elle avait applaudi le retour de la République, George Sand, fidèle à elle-même, resta toujours

  1. Lors de l’impression dans les Revues russes du ie et des viiie et ixe chapitres de ce livre.