Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T1.djvu/455

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Magnus disparaît. Quelque temps après on apprend qu’il est allé s’ensevelir dans un monastère d’où l’on voit bientôt surgir des dénonciations contre bon nombre de personnes et contre Lélia elle-même (une manière comme une autre de se réconcilier avec le ciel et le dogme). Le mouvement politique dirigé par Trenmor-Valmarina est découvert, ses fauteurs sont exilés ou mis à mort. Plusieurs membres du haut clergé qui avaient secondé Lélia dans sa généreuse activité sont disgraciés ou interdits. Monseigneur Annibal échappe au châtiment en s’empoisonnant. Par sa mort, Lélia a perdu l’unique soutien qu’elle avait au monde. Citée devant le tribunal de l’inquisition, elle est accusée de tous les crimes : d’avoir entraîné dans la voie de la perdition un prince de l’Église, d’avoir inhumé le cadavre d’un suicidé dans la terre sainte du couvent, d’avoir entretenu des relations criminelles avec l’impie Sténio, d’avoir aidé à l’évasion de Trenmor, d’avoir eu des rapports avec les carbonari, d’avoir disposé arbitrairement du trésor du couvent. Elle est condamnée à être dégradée de sa dignité et reléguée dans une chartreuse. Elle erre, seule et abandonnée, dans un coin solitaire de la montagne. C’est là que Trenmor la voit mourir. Il lui rend les derniers devoirs et l’enterre au bord du lac, en face de la tombe de Sténio. Assis an bord de ce lac qui sépare les deux tombes, il voit deux météores, tout comme dans le Ratkliff de Heine) qui s’approchent en voltigeant des deux rives opposées, se rencontrent, puis se séparent de nouveau, s’éloignant chacun de son côté. Pour Trenmor, ces deux feux follets sont les âmes malheureuses de Lélia et de Sténio qui n’ont pu se comprendre sur terre. Absorbé dans ses pensées, il médite quelques moments, puis se rappelant qu’il y a encore des malheureux à consoler et