Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/194

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doses de vertu, de probité, d’intelligence et de raison, et celui qui m’a le plus agitée, c’est celui dont je hais le plus les idées et dont j’admire le plus l’individualité. C’est le dernier, ce qui prouve qu’il est facile d’égarer les hommes et d’abuser des dons de Dieu ; mais je fais serment devant lui, que si l’extrême gauche vient à régner, ma tête y passera comme bien d’autres, car je dirai mon mot.

« Ce que je vois au milieu de ces divergences de sectes rénovatrices, c’est un gaspillage de sentiments généreux et de pensées élevées ; c’est une tendance à l’amélioration sociale, une impossibilité de produire pour le moment, faute de tête, à ce grand corps aux cent bras, qui se déchire lui-même, ne sachant à quoi s’attaquer. Ce conflit ne fait encore que bruit et poussière. Nous ne sommes pas dans l’ère où il construira des sociétés et les peuplera d’homme perfectionnés… »

« … Je voudrais voir un homme d’intelligence et de cœur chercher partout la vérité et l’arracher par morceaux à chacun de ceux qui l’ont dépecée et partagée entre eux. Je voudrais le voir passer par toutes les sectes pour les connaître et les juger. Je voudrais, qu’au lieu de le mépriser et de le railler pour sa mobilité, les hommes l’écoutassent comme le plus éclairé et le plus zélé des prêtres de l’avenir… Souvenez-vous de ce que je vous dis : un jour vous ne croirez plus à aucune secte religieuse, à aucun parti politique, à aucun système social. Vous ne verrez pour les hommes qu’une possibilité d’amélioration soumise à mille vicissitudes… J’ai regret à ces trésors de vertu et de courage qui s’isolent les uns des autres, et si je pouvais réussir à fondre ensemble le produit de cinq paires de bras, je croirais avoir assez fait pour ma part, eu égard à la force des miens… »

Comme nous le voyons, la première impression que lui