Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/239

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exciter, entretenir les sympathies pour le l’eau et le sublime.

Tout cela correspondait parfaitement aux sentiments éprouvés par Liszt dans sa jeunesse, lorsqu’il cherchait à exhaler en musique ses aspirations mystiques, ou bien lorsqu’au contraire, c’était la musique qui l’élevait vers le ciel. Il se souvint alors de ce temps lointain et « il fut envahi par le sentiment inextinguible de sa vocation artistique prédestinée. » Il ne lui suffisait plus, comme par le passé, d’être prêtre ; il voulait devenir un pontife des Saint-Simoniens, consacrer son art au service de cette fonction d’intermédiaire qui, par la voie du Beau, devait éveiller dans les hommes la notion du Divin et les unir à l’Éternel.

On ignore ce qui a pu retenir Liszt de prendre une part active au saint-simonisme. Peut-être en fut-il empêché par les discordes qui naissaient alors en cette petite église et par la lutte qui s’engagea entre Bazard et Enfantin. Quoi qu’il en soit, il n’entra pas dans les rangs de la communauté, mais assista à ses réunions et se trouvait même à la soirée où Enfantin attendait la venue de la « femme révélatrice »… qui ne vint pas.

Les égarements du saint-simonisme et ses idées baroques sur la « réhabilitation de la chair » n’eurent aucune influence sur l’esprit de Liszt, mais les principes de la société, en fait de religion et d’art, contribuèrent à établir la base de son point de vue artistique, qu’il suivit constamment dès lors et que vint encore confirmer l’amitié qu’il avait contractée depuis quelque temps avec Lamennais.

Félicité de Lamennais (il écrivait d’abord de la Mennais mais, vers la fin de sa vie, conformément aux habitudes républicaines, il signait : Lamennais), célèbre réformateur religieux, prédicateur, un des plus grands écrivains de notre siècle, naquit en 1782, à Saint-Malo, d’une riche