Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/334

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vent en partie être rejetés sur Mme Dudevant. Il ne peut approuver la lettre qu’elle a écrite à son mari en 1825 ; si elle n’a pas trahi son mari, elle peut du moins s’accuser d’adultère moral. Son mari ne l’a point délaissée, elle a joui d’une pleine indépendance. La société peut reprocher au mari de ne pas s’être servi de ses droits et de n’avoir pas conseillé sa femme. Mais les « imputations infâmes et impies » du mari autorisent Mme Dudevant à demander la séparation. Le mari, pour se défendre, n’avait pas besoin de recourir à accuser sa femme. En conséquence, le procureur rejette la contre-enquête exigée par le mari pour les faits produits par lui contre sa femme et demande la séparation des conjoints. Mais il faut que Maurice reste sous la garde du père et Solange sous celle de sa mère.

La cour s’éloigna, et au bout de trois quarts d’heure d’attente, déclara que les voix des juges étant également partagées, une nouvelle plaidoirie des parties était fixée à lundi en huit. George Sand, dans l’Histoire de ma Vie et dans ses lettres, dit que presque tout le public assistant au procès de Bourges était d’abord contre elle, mais qu’à la fin du procès tout le monde — « le monde de Bourges qui est tout ce qu’il y a de plus cagot » — avait pris partie pour elle ; Michel avait gagné tous les cœurs, avait fait pleurer tout le monde : « Vous n’avez pas l’idée du succès moral que j’ai eu dans cette affaire », écrit-elle à Boucoiran le 1er  août[1]. Aussi, lorsqu’il fut annoncé que les voix des juges s’étaient partagées, « des huées et des sifflets[2] » éclatèrent dans la salle.

Dudevant, qui avait dû se laisser dire par la bouche du

  1. Inédite.
  2. Lettre inédite à sa mère du 30 juillet 1836.