Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T2.djvu/88

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allai. Je la revis le surlendemain, elle était levée, vint aimablement me recevoir, et me dit qu’elle se sentait bien. Environ une quinzaine de jours plus tard, le même domestique de l’hôtel revint m’appeler en me remettant un billet signé George Sand[1]. Le billet était écrit en mauvais italien, mais assez clairement cependant pour me faire comprendre que le monsieur français (signor francese), que j’avais vu dans la chambre de la dame était très malade, plongé dans un délire continuel, et qu’on me priait, si faire se pouvait, de venir au plus vite en me faisant accompagner d’un autre docteur pour une consultation, car il s’agissait d’un homme doué d’un grand génie poétique et d’un être qu’elle aimait par-dessus tout au monde. J’y courus aussitôt et le docteur Juannini se joignit à moi, jeune homme excellent, mon collègue, adjoint à l’hôpital de Saint-Jean et Paul…

« L’impression que me fit l’extérieur de Musset n’était pas nouvelle pour moi, » — dit Pagello dans sa lettre au professeur Moreni, — « elle resta la même que quinze jours auparavant : figure fine et spirituelle, organisme enclin à la phtisie, ce que l’on voyait à ses mains longues et maigres, au faible développement de sa poitrine, à sa figure tirée et à la rougeur de ses pommettes… »

« D’après notre diagnostic, la maladie consistait en une fièvre nerveuse thyphoïde[2]. La cure fut longue et difficile,

  1. Cette lettre et le récit du Dr Pagello sont imprimés dans l’Illustrazione Italiana du 1er  mai 1881, dans l’article de Raffaelo Barbiera Una lettera inedita di Giorgio Sand. Le vicomte de Spoelberch en a donné dans le Cosmopolis et puis dans son livre la Véritable histoire, avec la traduction française, le texte italien qui avait été reproduit photographiquement pour lui par les héritiers de M. Minoret. Nous le traduisons sur l’original.
  2. Nous avons déjà dit que par délicatesse et discrétion de médecin le Dr Pagello n’a pas appelé la maladie de son vrai nom.