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Page:Karenin - George Sand sa vie et ses oeuvres T3.djvu/701

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complit grâce à la toute-puissance de l’amour. Amour de Fadette pour l’un des « bessons du père Barbeau », le beau Landry : amour de ce dernier réchauffant et illuminant la malheureuse existence du petit diable persécuté, remplissant d’une gratitude ardente son pauvre cœur, assoiffé de tendresse et de soleil. Cette simple histoire, compliquée par l’attachement jaloux et maladif de l’autre besson, Sylvain, pour son frère, est narrée par l’auteur avec une incomparable finesse, il s’en échappe comme un parfum de premier amour. Et les tableaux de la vie rustique, avec ses jours de travail et ses jours de fêtes, enveloppent l’action d’une fraîcheur extrême de réalité et de réalisme, oui, de réalisme, c’est le mot, en dépit de ceux qui prétendent que tous les romans champêtres de George Sand ne sont « qu’une parfaite idylle et ne reproduisent nullement la vie réelle ». Nous avons dans notre premier volume raconté que jusqu’à quinze ans George Sand vécut au milieu des champs, en compagnie des enfants du village : sa participation à leurs jeux, leurs joies et leurs peines, ainsi qu’à celles des gens de la campagne en général, lui donna cette grande entente de la vie rurale qui ne s’acquiert ni par des excursions sur le lieu d’action d’un roman quelconque, ni par des collections de « documents humains » coupés dans les journaux. Cette intimité avec le peuple, ce lien avec le terroir, durant l’enfance avec ses impressions inconscientes, ainsi que durant les années conscientes passées au village, firent que dès que George Sand touchait à des types de paysans, ils apparaissaient sous sa plume tout palpitants de vie, surtout les personnages secondaires. Le père Lhéry et sa femme dans Valentine, les Bricolin dans le Meunier, la mère Gothe dans Jeanne, le père Maurice, le père Léonard et la mère Guillette dans la Mare au Diable, le vagabond Cadoche dans Jeanne, le demi-vagabond Jean Jappeloup dans le Péché de M. Antoine, les coquettes villageoises : la Sévère et Catherine Guérin, les ingénues du village : l’espiègle Claudie, amie de Jeanne, et la jolie Rose Bricolin dans le Meunier, le meunier lui-même, à la langue si bien pendue, Sylvain Charasson, l’écuyer rustique