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CONTES ET NOUVELLES.

son neveu était occupée. M. Saunders avait attendu patiemment pendant quinze jours ; mais il lui avait été impossible d’accorder un plus long délai ; il avait écrit à Lausanne, et l’oncle Éloi lui avait répondu qu’il ne savait pas ce qu’était devenu son neveu, qu’il le remerciait beaucoup d’avoir attendu si longtemps, qu’il le suppliait de lui donner des nouvelles dudit neveu aussitôt qu’il le verrait ; car on doit finir par arriver de Lausanne à Genève, quelque industrie que l’on ait pour allonger les chemins. Il ajoutait à cette prière celle de ne pas parler à Eugène de la sollicitude de son oncle.

Eugène Milbert, comme il se l’avouait parfois à lui-même s’exagérait de beaucoup les sévérités de son oncle. Éloi Milbert, à cinquante ans, se croyait encore un jeune homme : cela explique le peu d’importance qu’il pouvait accorder à un jeune garçon de vingt-deux ans, qui lui semblait un enfant. Eugène, de son côté, s’accordait trop libéralement cette importance qui lui était refusée, se considérait comme un homme mûr, et trouvait son oncle décrépit. L’oncle, ancien ami de M. Gautherot, avait obtenu la main de sa