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CONTES ET NOUVELLES.

Quand l’oncle Éloi et Félix furent dans la rue, ils ouvrirent la lettre.

« Mon cher Félix, je pars désespéré ; je ne sais si je n’étais pas moins triste quand je l’ai crue morte. Le but de ma vie est manqué. Je n’aurai pas recours à mon oncle, que je hais maintenant. Un négociant veut m’emmener en Amérique, pour tenir les écritures à bord de son navire et dans sa maison. Je pars dans quelques heures, quoique je ne sois qu’à peu près guéri. Peut-être ne reverrai-je jamais la Suisse ! Je n’oublierai pas toutes les preuves d’amitié que j’ai reçues de toi.» Ton ami.

» Adieu.
» Eugène. »

L’oncle Éloi paraissait atterré, et répétait sans cesse :

— En Amérique !

— J’aime autant cela, se disait Félix ; il reviendra calme et guéri de son amour.

— Ah ! monsieur !… dit l’oncle.

Mais on vint les avertir que la diligence repartait pour Genève, et, comme ils n’avaient rien