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D’un coup féroce, et lui ramenant
Le sens du feu dévorateur au cœur et au cerveau.

XXXV

Ce fut une vision. Dans l’engourdissante obscurité,
Dans la tristesse de minuit, aux pieds de sa couche
Lorenzo se tenait, et pleurait ; la tombe de la forêt
Avait souillé sa luisante chevelure qui autrefois lançait
Ses éclats jusqu’au soleil, et mis sa froide empreinte
Sur ses lèvres, et brisé le suave luth
De sa voix rendue au silence ; le long de ses oreilles fangeuses
Un lit de boue était creusé par ses larmes.

XXXVI

Étrange fut le son que fit vibrer l’ombre blafarde ;
Car elle s’efforçait, cette langue digne de pitié,
De parler comme lorsque sur terre elle était éveillée,
Isabelle, haletante, écoutait cette musique
Languissante et secouée de hoquets,
Comme le chant d’une harpe druidique aux cordes distendues ;
On y percevait les lamentations en sourdine d’un spectre,
Telles les rauques rafales nocturnes parmi les ronces des sépulcres.