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296 POÈMES ET POÉSIES

Le jaune soufre foncé remplaça
La couleur plus tendre de la lune qui ornait son corps gracieux,
Et, — telle la lave dévastant une prairie, —
Ternit ses écailles d’argent et ses tresses d’or,
Obscurcit ses taches fauves, ses stries et ses rayures,
Eclipsa ses croissants, éteignit ses étoiles ;
Si bien qu’en quelques secondes elle fut dépouillée
De tous ses saphirs, ses émeraudes, ses améthystes,
Et de ses rubis argentés : toutes ces parures lui furent enlevées,
Il ne lui resta que la souffrance et la hideur.
Sa couronne gardait encore une lueur ; celle-ci évanouie, sa forme aussi
Se fondit et disparut soudainement.
Alors, dans l’air, sa voix nouvelle résonnant avec tendresse.
Cria « Lycius ! charmant Lycius I » Suspendues
Dans les brumes diaphanes enveloppant les antiques montagnes
Ces paroles s’évaporèrent : les forêts de Crète ne les entendirent jamais plus.

Où s’envola Lamia, devenue une dame resplendissante,
Une beauté de haute lignée, jeune et élégante ?
Elle s’envola dans cette vallée que traverse
Tout voyageur qui va des rivages de Cenchrée à Corinthe ;
Là, elle se reposa au pied de ces vastes collines