Page:Keats - Poèmes et Poésies, trad. Gallimard, 1910.djvu/312

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

308 POÈMES ET POÉSIES

Un supplice plus affreux qu’un déjeuner d’ermite :
Ceci est un conte nébuleux du pays des fées
Difficile à comprendre pour les non élus.
Si Lycius avait vécu pour transmettre son histoire
Il aurait pu donner à la morale un nouveau froncement de sourcil
Ou l’étrangler tout à fait : mais trop court fut leur bonheur
Pour nourrir la défiance et la haine qui fait siffler la douce voix.
De plus, là, nuitamment, jetant un regard de haine,
L’Amour, devenu jaloux d’un couple aussi uni,
Déploya, puis fit bruire ses ailes en un terrible grondement
Au-dessus du linteau de la porte de la chambre,
Tandis qu’en dessous filtrait un rayon sur le plancher.

Toutes ces circonstances amenèrent la catastrophe : côte à côte
Comme sur un trône, le soir, ils étaient
Couchés, abrités par un lambrequin
Dont l’étoile aérienne, tissée de fil d’or,
Flottait à travers la salle, et laissait apparaître
Sans voile le ciel d’été, bleu et clair,
Entre deux fûts de marbre : — ils reposaient là
Où la lassitude leur avait procuré le doux sommeil, les paupières closes.
Sauf un mince interstice que l’amour conservait entr’ouvert