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À LESBOS

D’autres fois, il rédigeait des véreux pour des brasseurs d’affaires.

Aussi était-il fort connu dans tous les cabinets, ou agences borgnes, de la capitale.

Que de projets insensés lui passèrent par les mains !

Que de millions il aligna… sur le papier.

À force de se frotter au contact de tous ces fous ou de ces escrocs, il finissait par perdre le sens réel de la vie.

De bonne foi, il croyait à la réussite de ces affaires, ou de ces inventions, dont les résultats se chiffraient par millions, et qui conduisaient leurs auteurs soit à l’hôpital, soit au bagne.

Pour manger, il aurait escroqué sans scrupule l’argent des gogos.

Un jour, il vint chez un ex-avoué — la prison n’avait pu le prendre — pour lui parler d’une entreprise superbe.

Il fallait un capital de cinq cent mille francs. Les bénéfices s’étalaient pompeusement sur des feuilles éparses qu’Eugène compulsait, tout en prenant du tabac adroitement dans la blague de l’ex-avoué.

C’était son unique ressource pour fumer.

L’agent d’affaires, déjà très rêveur, ne repoussa