Page:Kempis - L Imitation de Jesus Christ, traduction Lammenais, edition Pages, 1890.djvu/44

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leur vie eût répondu à leur science ! Ils auraient lu alors et étudié avec fruit.

Qu’il y en a qui se perdent dans le siècle par une vaine science et par l’oubli du service de Dieu !

Et parce qu’ils aiment mieux être grands que d’être humbles, ils s’évanouissent dans leurs pensées.

Celui-là est vraiment grand, qui a une grande charité.

Celui-là est vraiment grand, qui est petit à ses propres yeux, et pour qui les honneurs du monde ne sont qu’un pur néant.

Celui-là est vraiment sage, qui, pour gagner Jésus Christ, regarde comme de la boue toutes les choses de la terre[1].

Celui-là possède la vraie science, qui fait la volonté de Dieu et renonce à la sienne.

RÉFLEXION.

Il y a deux doctrines, mais il n’y a qu’une vérité. Il y a deux doctrines, l’une de Dieu, immuable comme lui ; l’autre de l’homme, changeante comme lui. La sagesse incréée, le Verbe divin répand la première dans les âmes préparées à la recevoir, et la lumière qu’elle leur communique est une partie de lui-même, de la vérité substantielle et toujours vivante. Offerte à tous, elle est donnée avec plus d’abondance à l’humble de cœur ; et comme elle ne vient pas de lui, qu’elle peut à chaque instant lui être retirée, qu’elle ne dépend en aucune façon de l’intelligence qu’elle éclaire, il la possède sans être tenté de vaine complaisance dans sa possession. La doctrine de l’homme, au contraire, flatte son orgueil, parce qu’il en est le père. « Cette idée m’appartient ; j’ai dit cela le premier ; on ne savait rien là-dessus avant moi. » Esprit superbe, voilà ton langage. Mais bientôt on conteste à cette puissante raison ce qui fait sa joie ; on rit de ses idées fausses qu’elle a crues vraies, de ses découvertes imaginaires : le lendemain on n’y pense plus, et le temps emporte jusqu’au nom de l’insensé qui ne vécut que pour être immortel sur la terre. Ô Jésus, daignez mettre en moi votre vérité sainte, et qu’elle me préserve à jamais des égarements de mon propre esprit !


  1. Philipp. III, 8.