Page:Kerigant - Les Chouans - Épisodes des guerres de l’Ouest dans les Côtes-du-Nord, 1882.djvu/53

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cha cette boucherie. Cet homme, qui, selon plusieurs témoignages, était du pays, effrayé de l’horrible spectacle dont il était un des acteurs principaux, et frappé sans doute aussi du courage de cette jeune femme, fut presque respectueux à son égard et l’engagea à se retirer. Sur son refus, elle fut gardée à vue dans un des appartements de la maison. Toutefois, le commandant de la colonne, voyant tous les siens à peu près ivres, et craignant une attaque, fit battre la retraite et se mit en marche vers Loudéac, emmenant Mme Le Gris du Val avec sa jeune sœur[1] prisonnière ; vingt et quelques chevaux, pris dans les fermes et chargés de butin, furent enlevés et traînés à la suite de la colonne.

Pendant que ces horreurs désolaient Boscenit, MM. Le Gris du Val et de Kerigant se trouvaient dans la baie de Saint-Brieuc ; ils s’y étaient rendus pour favoriser un débarquement d’armes.

Mme de Kerigant, absente du château depuis quelques jours, revint peu d’instants après le départ de la colonne. L’affreux spectacle était toujours là : le brasier fumant achevait de consumer les cadavres amoncelés dans la cour ; des émanations étouffantes emplissaient l’air. Pétrifiée à cette vue, Mme de Kerigant ne put d’abord verser une larme ni prononcer

  1. Depuis Mme Le Coniac de La Pommerais.