Page:Kindt - Impressions d une femme au salon de 1859.djvu/105

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travaille ; devant elle, un jeune homme, respectueux encore, tendre, ému, lui parle, lui dit des choses indifférentes, mais, d’une voix qui tremble, lui dit :

— Vous filez là de bien beau chanvre !

D’un ton qui signifie :

— Heureux chanvre que touchent vos jolis doigts.

Il ajoute :

— Est-ce que le travail vous amuse ?

D’un ton qui veut dire :

— Laisse-là ton ouvrage, ô belle enfant ! et viens errer avec moi dans les bois !

Que le peintre me montre cette scène de séduction, qu’il nous fasse voir l’émotion de cette enfant, dont la joue s’allume et dont le cœur bat, je devine que le démon est en tiers entre ces deux amants ; mais me montrer le diable, sa présence réelle, parlant à sa personne, — comme disent les huissiers, — cela est absurde, cela est injurieux pour le spectateur. Cela est de la même naïveté que les légendes écrites que les peintres primitifs faisaient sortir de la bouche de leurs personnages.

Quel niais pourtant que ce Faust ! quel niais maladroit et sans cœur ! Il évoque le diable, il se