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suprême où venait de succomber celui dont la mort inaugure un monde nouveau, comme autrefois à l’enfantement de la république la mort de Lucrèce et des fils de Brutus.

Nous n’avons rien vu de tout cela dans le tableau de M. Gérôme, parce que M. Gérôme a trop suivi les conseils de la photographie, et que la tête de son César est complétement dans l’ombre ; les pieds seuls sont en pleine lumière ; le haut du corps, on le cherche, on le devine.

Je sais bien que le drame tout entier paraît être dans le siége curule renversé, je sais que le corps du dictateur n’offre qu’un intérêt trop secondaire, n’importe, il fallait que, quoique ému et occupé des détails, on pensât un peu aussi à ce cadavre saignant et abandonné sur les dalles du sénat.

Alors, c’eût été une composition grande et magistrale ; le tableau, tel qu’il est, n’est qu’une vignette, non une page d’histoire, comme veut nous le faire croire M. Gérôme par la dimension de sa toile.

Je suis d’avis que, pour représenter en peinture de grandes choses, il faut plus d’un personnage. Rubens, Michel-Ange, Raphaël et tant d’autres maîtres, comprenaient autrement la composition ;