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Dans ces Impressions d’une femme, vous vous étonnez déjà que la mode n’ait pas encore fait irruption. La voici, escortée de ses serviteurs les plus zélés, messieurs les portraitistes jurés.

M. Dubufe fils est certainement un homme de talent, un peintre habile, mais il sacrifie à la mode ; la mode est sa muse. Il excelle à faire joli, et c’est ce qui enchante sa ravissante clientèle de jolies femmes. M. Édouard Dubufe a trop d’intelligence pour ne pas savoir ses défauts mieux que moi-même. Mais ses défauts lui sont imposés, aussi ne voudrais-je pas lui reprocher son procédé un peu mesquin, sa recherche, sa mignardise, son faire vitreux et mou, son manque d’accent, de réalité.

Je m’en prends à ses modèles, et je leur dis :

Ah ! mesdames, comment êtes-vous si peu intelligentes que d’exiger de tels sacrifices de M. Dubufe ? Comment prenez-vous pour le beau cette grâce factice, cette recherche galante et légère ; comment pouvez-vous croire qu’on arrive à la ressemblance par cette peinture lisse, où l’on ne sent ni les os, ni les muscles, par ce maniérisme fluide et souple, mais inconsistant, par cette grâce débile ?

Vous serez punies vous-mêmes par où vous avez péché. Votre portrait vous enchante aujourd’hui ;