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faire. C’est la Veuve de l’organiste, par M. Cabanel. M. Cabanel est un idéaliste, un talent correct, fin, un talent issu de l’école des Beaux-Arts, et qui cependant a su dépouiller ce que les poncifs de cette école ont d’antipathique aux gens intelligents. Dans ce tableau de la veuve, la principale figure : est fort belle, pleine de douleur et d’émotion. Les autres sont moins heureuses, un peu entachées de cette affectation angélique des néo-Allemands. Ange ou bête, a dit Pascal, c’est lorsqu’on veut faire l’ange qu’on fait la bête. Le jeune homme blond qui prend une pose rêveuse et affecte le sentiment, fait l’ange.

La couleur du tableau est agréable, mais trop léchée. En somme, malgré tous ses défauts, l’œuvre touche. C’est une page d’un roman intéressant que nous avons sous les yeux.

Il se peut qu’on se récrie sur cette phrase, qui, pour moi, est un éloge. Je sais bien que beaucoup de peintres ont la prétention de pouvoir se passer du sujet. Pour eux, la peinture doit, comme la musique, chercher ses effets dans la mélodie, dans l’harmonie des couleurs, et faire naître la pensée en s’adressant d’abord aux sens. Pour moi, tout en reconnaissant qu’il ne suffit pas de trouver un sujet intéressant pour intéresser, je