Page:Kindt - Pour se damner.djvu/142

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tait chez sa grand’mère, la comtesse de M…, un magnifique hôtel entre cour et jardin ; des fenêtres d’Armand on apercevait les chambres de service et le perron de l’hôtel ; il pouvait donc entrevoir sa bien-aimée alors qu’elle rentrait ou qu’elle sortait ; et le pauvre garçon, dans ce fugitif espoir, passait sa vie chez lui, sans vouloir s’éloigner d’une minute.

Cet amour lui était venu tout à coup, un jour que, fumant insoucieusement sa cigarette, il avait entendu rire non loin de lui.

Debout, sur les marches du perron, une femme mettait ses longs gants de Suède ; un grand chapeau Rembrandt, orné de plumes, faisait ombre sur un adorable visage de jeune fille ; des cheveux blonds, de ce blond cendré et fin qu’on ne voit plus que dans les pastels d’autrefois, avançaient un peu sur des yeux bleus, lumineux comme les étoiles du ciel ; une bouche rose où les baisers devaient pépier comme des oiselets, éclatait de rire montrant les dents exquises ; la taille était divine, une nymphe dans une tunique collante ; tout