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LE SOLEIL ET LES ROSES


Seigneur, j’eus tort ! J’ai trop rêvé, j’ai trop pensé,
J’ai voulu, dans ma fougue insensée et ravie,
Supprimer la laideur brutale de la vie,
Et voici que mon cœur est un oiseau blessé.
 
Les tristesses, de jour en jour accumulées,
Se lèvent, emplissant mon âme d’un émoi
Presque voluptueux, et je sens sourdre en moi
La folle explosion des larmes refoulées.
 
Oh ! puisqu’il n’y a plus de place pour ceux-là
Qui marchent en levant les yeux vers les étoiles,
Puisque les hommes sont trafiquants jusqu’aux moelles
Et que mes mots sont ceux qu’ils ne comprennent pas ;
 
Puisqu’un vil intérêt fait cligner les paupières,
Puisque la main tendue est un calcul obscur,
Puisqu’un éclair honteux luit dans les yeux d’azur,
Puisque tout est boueux dans nos villes de pierre ;

O Seigneur, laissez-moi communier un peu
De l’intime bonté des choses naturelles,
Des rayons, des parfums et des battements d’ailes
Et du ravissement immense du ciel bleu !