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L'AME DES SAISONS


Elle serait debout au bord de la pelouse,
Avec du clair de lune aux bouillons de sa blouse
Neigeuse, rougissant d’un aimable embarras
Et sur sa jupe unie et sombre laissant pendre,
Dans sa main finement ouvrée en cire tendre,
Une rose opulente et un brin de lilas.
 
Elle serait, ainsi qu’une pensionnaire,
Amusée et riant de ses yeux de lumière,
Mais toutefois émue à cause que la nuit
Craque dans les parfums sous la lune qui luit,
Et qu’on entend soudain, en longeant les verveines,
Ronronner sourdement le rouet des phalènes...

Parfois, l’arôme trop suave des taillis,
La voix des rossignols aux roulades trop mièvres,
Le feuillage bleuâtre aux frou-frous trop jolis
Attendriraient, un peu subitement, nos lèvres...
Je lui dirais : « Je t’aime... » Elle dirait : « Méchant... »
Et la lune rirait sous sa cape d’argent.