Page:Kipling - Au hasard de la vie, trad. Varlet, 1928.djvu/72

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signifie, dit la voix du commissaire-délégué, qui avait rejoint les interlocuteurs.

— Oh ! répondit Curbar (lequel, étant de la police, ne pouvait comprendre que quinze années d’éducation devaient, en principe, changer un Bengali en Britannique). Il y a eu un combat sur la frontière, et des tas d’hommes tués. Il va y avoir un autre combat, et on tuera encore des flopées de gens.

— Pourquoi cela ?

— Parce que les millions d’individus qui grouillent dans ce district ne vous estiment pas tout à fait, et se figurent que sous votre domination bénigne ils vont avoir du bon temps. J’ai idée que vous feriez mieux de prendre vos dispositions. J’agis, comme vous le savez, d’après vos ordres. Que décidez-vous ?

— Je… je vous prends tous à témoins que je n’ai pas encore assumé la charge de ce district, balbutia le commissaire-délégué, sur un ton qui n’avait rien de « plus anglais ».

— Ah ! je le pensais bien. Allons, comme je vous disais, Tallantire, votre plan est sage. Exécutez-le. Avez-vous besoin d’une escorte ?

— Non ; rien que d’un cheval convenable. Mais qui va télégraphier au quartier général ?

— J’imagine, d’après la couleur de ses joues, que notre chef hiérarchique va envoyer quelques mirobolants télégrammes avant la fin de la nuit. Qu’on le laisse faire cela, et la moitié des troupes de la province vont nous arriver pour voir ce qui se passe. Allons, dépêchez-vous, et prenez garde à