Page:Kipling - Au hasard de la vie, trad. Varlet, 1928.djvu/76

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Marche en sortant par la passe de Jagai. » Puis, en écriture anglaise courante : « Votre sincère ami. »

— Brave homme ! dit Tallantire. C’est là l’œuvre de Khoda Dad Khan. Ce sont les seuls mots d’anglais qu’il ait jamais pu se fourrer dans la tête, et il en est extrêmement fier. Il joue contre le mullah pour son propre compte… le traître jeune bandit !

— Je ne connais pas la politique des Khusru Kheyl, mais si vous êtes content, moi aussi. Ce papier a été lancé du dehors hier soir par-dessus la porte principale du fort, et j’ai pensé que nous pourrions toujours nous préparer et voir de quoi il retournait. Oh ! mais c’est que nous sommes malades de la fièvre ici, et pas d’erreur ! Est-ce que ça va être une grosse affaire, pensez-vous ? demanda Tommy Dodd.

Tallantire lui esquissa brièvement la situation, et Tommy Dodd en l’écoutant sifflotait et tremblait de fièvre alternativement. Cette journée-là fut consacrée à la stratégie, à l’art de la guerre et au réconfort des malades, si bien qu’au crépuscule il y avait de prêts quarante-deux troupiers, pâles, efflanqués et hagards. Tommy Dodd les inspecta avec orgueil et les harangua en ces termes :

« Ô hommes ! Si vous mourez vous irez en enfer. Par conséquent efforcez-vous de rester vivants. Mais si vous allez en enfer ça ne peut chauffer là dedans plus qu’ici, et on ne nous a pas dit que nous y souffririons encore de la fièvre. Par conséquent n’ayez pas peur de mourir. Par file à droite !

Ils ricanèrent d’aise, et s’en allèrent.