Page:Kipling - Histoires comme ça pour les petits, trad Humières et Fabulet, 1903.djvu/204

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à chanter et la femme du Papillon resta sur le flanc, à l’ombre du Camphrier, gigotant des ailes et soufflant :

— Oh ! je serai bonne ! je serai bonne !

Suleiman-bin-Daoud pouvait à peine parler, tant il riait ; il s’appuya au tronc, tout faible et hoquetant à force de rire, et, menaçant du doigt le Papillon, il dit :

— Ô grand Sorcier ! que sert de me rendre mon Palais, si en même temps tu me fais mourir de gaieté ?

Alors un bruit terrible se fit entendre, car toutes les neuf cent quatre-vingt-dix-neuf Reines sortirent du Palais en criant et appelant leurs bébés. Elles descendirent à la hâte le grand escalier de marbre qui menait aux fontaines ; elles couraient cent de front à la fois, et la Très Sage Balkis s’avança, majestueuse, à leur rencontre et dit :

— Quel malheur est le vôtre, ô Reines ?

Elles s’arrêtèrent sur l’escalier de marbre, par cent de front à la fois, et crièrent :

— Elle demande quel est notre malheur ? Nous vivions en paix dans notre Palais d’Or, selon notre coutume, quand tout à coup le Palais disparut et nous restâmes assises dans l’obscurité profonde et redoutable ; et il tonna, tandis que les Djinns et les Effrits marchaient dans les ténèbres ! Le voilà, notre malheur, ô Sultane Reine ! et nous sommes le plus extrêmement malheureuses du monde à cause de ce malheur, car ce