Page:Kipling - Le Livre de la jungle, illustré par de Becque.djvu/131

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Solitaire ; et, comme il regardait les étoiles, il se sentit heureux.

— J’en ai assez de dormir dans des trappes, Akela. Prenons la peau de Shere Khan et allons-nous-en. Non, nous ne ferons pas de mal au village, car Messua fut bonne pour moi.

Quand la lune se leva, inondant la plaine de sa clarté laiteuse, les villageois, terrifiés, virent passer au loin Mowgli, avec deux loups sur les talons et un fardeau sur la tête, à ce trot soutenu des loups qui dévorent les longs milles comme du feu. Alors, ils sonnèrent les cloches du temple et soufflèrent de plus belle dans les conques ; et Messua pleura, et Buldeo broda l’histoire de son aventure dans la jungle, finissant par raconter que le loup se tenait debout sur ses jambes de derrière et parlait comme un homme.


La lune allait se coucher quand Mowgli et les deux loups arrivèrent à la colline du Conseil ; ils firent halte à la caverne de Mère Louve.

— On m’a chassé du Clan des hommes, Mère ! héla Mowgli, mais je reviens avec la peau de Shere Khan. J’ai tenu parole.

Mère Louve sortit d’un pas raide, ses petits derrière elle, et ses yeux s’allumèrent lorsqu’elle aperçut la peau.

— Je le lui ai dit, le jour où il fourra sa tête et ses épaules dans cette caverne, réclamant ta vie, petite grenouille — je le lui ai dit, que le chasseur serait chassé. C’est bien fait.

— Bien fait, Petit Frère ! dit une voix profonde qui