Page:Kipling - Le Livre de la jungle, illustré par de Becque.djvu/264

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balançait sa tête de-ci et de-là, cherchant à glisser un mot dans la conversation. Et je l’entendis qui disait timidement, en toussant pour s’éclaircir la gorge :

— J’ai — j’ai — j’ai fait un peu la guerre, mais ce n’était pas en grimpant, ni en courant comme cela.

— Non. Maintenant que tu le dis, repartit Billy, on s’en aperçoit. Tu n’as pas beaucoup l’air fait pour grimper ou courir. Eh bien ! comment cela se passait-il chez toi, balle de foin ?

— De la vraie manière, répondit le chameau. Nous nous couchions tous — —

— Oh ! Croupière et Martingale ! s’exclama le cheval de troupe entre ses dents. Couché !

— Nous nous couchions, une centaine environ… continua le chameau, en un grand carré, et les hommes empilaient nos kajawahs, nos charges et nos selles, à l’extérieur du carré ; puis ils tiraient par-dessus notre dos, oui, de toutes les faces du carré.

— Quelle sorte d’hommes ? N’importe quels hommes au hasard ? demanda le cheval de troupe. On nous apprend à l’école du cavalier à nous coucher et à laisser nos maîtres tirer par-dessus nous, mais Dick Cunliffe est le seul homme à qui je me fierais pour cela. Cela me chatouille au passage des sangles et, en outre, je n’y vois rien, avec la tête sur le sol.

— Que vous importe qui tire par-dessus vous ? répondit le chameau. Il y a beaucoup d’hommes et beaucoup de chameaux tout près, et des masses de fumée. Je n’ai pas peur, alors. Je reste tranquille, et j’attends.