Page:Kipling - Le Livre de la jungle, trad. Fabulet et Humières.djvu/245

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tendues en avant pour écouter le vent du soir qui soufflait tout doucement à travers les montagnes. L’air était rempli de tous les bruits de la nuit, qui, rassemblés, font un seul grand silence : le clic-clac d’une tige de bambou contre l’autre, le froufrou d’une chose vivante dans l’épaisseur de la brousse, le grattement et le cri étouffé d’un oiseau à demi réveillé (les oiseaux sont éveillés dans la nuit beaucoup plus souvent qu’on ne pense), une chute d’eau ; très loin…

Petit Toomai dormit quelque temps… Quand il s’éveilla, il faisait un éclatant clair de lune, et Kala Nag veillait toujours, debout, les oreilles dressées. Petit Toomai se retourna dans le fourrage bruissant, et considéra la courbe de l’énorme dos sur le ciel dont il cachait la moitié des étoiles ; et, pendant qu’il regardait, il entendit, si loin que ce bruit faisait à peine comme une piqûre d’épingle dans le silence, l’appel de cor d’un éléphant sauvage. Tous les éléphants, dans les lignes, sautèrent sur leurs pieds, comme frappés d’une balle, et leurs grognements finirent par réveiller les mahouts endormis ; ceux-ci sortirent et frappèrent sur les chevilles des piquets avec de gros maillets, puis serrèrent telle corde et nouèrent telle autre, et tout