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le second livre de la jungle

fit tourner au jaune, puis au brun, et enfin au noir.

Les verdures, aux flancs des ravins, furent grillées, réduites en fils de fer brisés et en pellicules racornies de végétation morte ; les mares cachées baissèrent entre leurs berges cuites qui gardaient la dernière et la moindre empreinte de patte, comme si on l’eût moulée dans du fer ; les lianes aux tiges juteuses tombèrent des arbres qu’elles embrassaient et moururent à leurs pieds ; les bambous dépérirent, cliquetant au souffle des vents de feu, et la mousse pela sur les rochers au profond de la Jungle, jusqu’à ce qu’ils restassent nus et brûlants comme les galets bleus qui miroitaient dans le lit du torrent.

Les oiseaux et le Peuple Singe, dès le commencement de l’année, remontèrent vers le Nord : ils savaient bien ce qui arrivait ; le daim et le sanglier envahirent les champs dévastés des villages, lointains, mourant parfois sous les yeux des hommes trop affaiblis pour les tuer. Quant à Chil, le Vautour, il resta et devint gras, car il y eut grande provision de charogne ; et, chaque soir, il apportait aux bêtes trop exténuées pour se traîner jusqu’à de nouveaux terrains de chasse, la nouvelle que le soleil était en