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Page:Kipling - Le Second Livre de la jungle.djvu/306

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chien rouge

moment où il débordait d’une saillie à l’air libre, et filtrait lourdement parmi les petites branches. Il y avait une grève minuscule, large de cinq pieds à peine, d’un côté de la rivière, où s’étaient haut amoncelés les détritus d’innombrables années. Là gisaient des abeilles mortes, des bourdons, des balayures, des rayons vides, des ailes de phalènes et de scarabées maraudeurs qui s’étaient égarés là en quête de miel, tout cela confondu en tas arrondis de fine poussière noire. L’âcre odeur qui s’en dégageait eût suffi pour épouvanter tout ce qui n’avait pas d’ailes et n’ignorait pas ce qu’était le Petit Peuple.

Kaa remonta le courant de nouveau jusqu’à un banc de sable à l’entrée de la gorge.

— Voici le gibier de la saison, dit-il. Regarde ! Sur le bord de la rivière, gisaient les squelettes d’une couple de jeunes cerfs et d’un buffle. Mowgli voyait bien que ni loup ni chacal n’avaient touché aux os qui avaient gardé leur disposition naturelle.

— Ils ont dépassé la ligne, ils ne savaient pas, murmura Mowgli, et le Petit Peuple les a tués. Allons-nous-en, avant qu’elles s’éveillent.

— Elles ne s’éveillent pas avant l’aurore, dit Kaa.