Page:Kipling - Trois Troupiers et autres histoires, trad. Varlet, 1926.djvu/269

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Prêtez l’oreille, sahib ! La rivière a changé de ton. Elle va s’endormir jusqu’à l’aube, qui viendra dans une heure. Avec le jour elle roulera de plus belle. Comment je le sais ? Suis-je ici depuis trente ans sans connaître la voix du fleuve comme un père connaît celle de son fils ? D’un moment à l’autre elle bavarde avec moins de colère. Je jure qu’il n’y aura pas de danger d’ici une heure, ou peut-être deux. Je ne saurais répondre de la matinée. Hâtez-vous, sahib ! Je vais appeler Ram Pershad, et cette fois il ne tournera pas le dos. Est-ce que la bâche est bien arrimée sur tout votre bagage ? Ohé, mahout ! sacrée tête de limon, l’éléphant pour le sahib, et dis à ceux de l’autre rive qu’on ne traversera plus après l’aurore.

De l’argent ? Non, sahib. Je ne suis pas de cette espèce. Ma maison est vide, comme vous le voyez, et je suis un vieillard.

Dutt[1] ! Ram Pershad ! Dutt ! Dutt ! Dutt ! Bon voyage, sahib.

  1. Hardi !