Page:Kipling - Trois Troupiers et autres histoires, trad. Varlet, 1926.djvu/91

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congé. Guerre ! sacrée guerre ! au nord, à l’est, au sud et à l’ouest.

— Amen, dit gravement Learoyd.

— Qu’est-ce que c’est que ça ? dit Mulvaney en tiquant sur une chose blanche au pied de la vieille guérite.

Il se baissa pour la toucher.

— C’est Norah !… Norah Mac Taggart ! Hé bien ! Norah ma chérie, qu’est-ce que tu fais hors du lit de ta mère à cette heure ?

L’enfant de deux ans, fillette du sergent Mac Taggart, avait sans doute erré en quête d’un souffle d’air frais jusqu’au bord même du parapet du fossé du fort. Sa minuscule chemise de nuit roulée en tapon autour de son cou, elle vagissait tout en dormant.

— Voyez-la ! dit Mulvaney ; pauvre agneau ! Regardez les boutons de chaleur sur la peau de cette innocente. C’est déjà dur… rudement dur, même pour nous. Qu’est-ce que ça doit être pour ces moucherons-là ? Réveille-toi, Nonie, tu vas mettre ta mère dans tous ses états. Parbleu, elle aurait pu tomber dans le fossé, cette môme !

Il la souleva dans la lumière grandissante et la posa sur son épaule : les boucles blondes effleuraient les mèches grisonnantes de son front. Ortheris et Learoyd suivaient en claquant des doigts, et