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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/125

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le chien d’or

— C’est bien ! comme vous voudrez, Le Gardeur ; du reste, je crois que nous en avons tous assez, peut-être trop, même.

Et il se mit à rire. Il ajouta :

— Je crois que le colonel Philibert nous fait rougir… ou plutôt nous ferait rougir, si nous ne portions déjà sur nos visages les teintes vermeilles de Bacchus.

Philibert, avec une politesse tout officielle, dit adieu à l’Intendant et aux convives.

Deux valets servirent Le Gardeur. Il se mit au bain et prit des vêtements nouveaux. Un peu plus tard, il sortait du château, à peu près sobre, et transformé en un brillant chevalier. Seulement, autour des yeux, une rongeur cuisante restait pour raconter la débauche de la nuit.

À la porte du château, assis avec la gravité d’un juge, sur le montoir, maître Pothier écoutait, en attendant le retour du colonel Philibert, les bruits joyeux de l’intérieur, le chant, la musique et le choc des coupes ; et tout cela formait à son avis, le plus harmonieux concert qu’il fut possible d’imaginer.

— Je n’ai pas besoin de vous pour m’en retourner, maître Pothier, voici votre salaire, lui dit Philibert en lui mettant quelques pièces d’argent dans la main. Ma cause est gagnée ! ajouta-t-il. N’est-ce pas, Le Gardeur ?

Il regardait son ami d’un air de triomphe en disant cela.

— Bonsoir, maître Pothier ! dit-il au vieux notaire, et il s’éloigna en compagnie de son ami.

Le vieux notaire ne pouvait pas les suivre ; il alla cahotant, par derrière, pas fâché d’avoir le temps et le loisir de conter et faire sonner ses pièces de monnaie. Il était dans cet heureux état d’un homme dont les espérances sont plus que réalisées. Il se voyait à l’auberge de la bonne dame Bédard, dans la charmante petite salle à manger, bien assis dans le vieux fauteuil, le dos tourné au foyer, le ventre appuyé à la table, un plat de rôti fumant devant lui, une bou-