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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/237

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LE CHIEN D’OR

— Je ne serai pas jalouse de votre sœur, Le Gardeur, dans tous les cas ! s’écria Angélique.

Et le souffle parfumé de ses lèvres enivrait Le Gardeur.

— Je ne vous donnerai pas mon amour parce que vous l’avez déjà, ajouta-t-elle… Mais pour aujourd’hui, ne me demandez rien de plus que cela.

Et elle lui passa au doigt un riche diamant.

Ce gage d’un amour auquel d’avance la perfide Angélique était parjure, fut comme un sceau fatal qui scella la destinée du jeune chevalier. Et, durant de longs temps encore, Le Gardeur croyant rencontrer chez mademoiselle Des Meloizes, un amour sans mesure comme le sien, but à longs traits comme un nectar, les paroles enivrantes qui sortaient de cette bouche astucieuse.

Hélas ! Il eut mieux valu pour lui, ne jamais naître, que de boire ainsi le poison de ces lèvres enchanteresses.

XII.

— Maintenant, Le Gardeur, répondez-moi, commença-t-elle, après une pause pleine de ravissements.

Nouvelle Dalilah, elle jouait avec la chevelure de Le Gardeur et le dépouillait de sa vertu.

— Il y a une femme à Beaumanoir, reprit-elle, dites-moi donc qui elle est et ce qu’elle est.

Le Gardeur n’aurait pas hésité à trahir le ciel pour elle ; mais il ne put en aucune façon lui donner les renseignements qu’elle désirait. Il ne savait pas en quelle qualité cette femme vivait à Beaumanoir. Angélique se mit à rire et à causer, avec un sang-froid étonnant, des fantaisies galantes de l’Intendant. Elle avait manqué son but. Elle fit promettre à Le Gardeur de bien s’informer et de venir lui rendre compte du résultat de ses recherches.

Minuit sonna à la cloche des Récollets. Angélique regarda son ami avec un sourire qui voulait dire : Entendez-vous ? et de son doigt effilé, elle lui donna sur la joue les douze coups de l’heure qui s’en allait.