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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/26

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le chien d’or

Le gouverneur faisait allusion à un exploit du galant officier qu’il interrogeait.

Probatum est, votre Excellence ! Un jour j’ai vaincu toute la Nouvelle-Angleterre avec six cents Canadiens, et pendant que nous balayions le Connecticut d’un bout à l’autre avec un balai de feu, les braves Bostonnais se précipitaient dans les églises pour implorer la pitié du Seigneur et demander leur délivrance.

— Brave Rigaud, la France n’a pas assez de soldats comme vous, reprit le gouverneur en le regardant avec admiration.

Rigaud s’inclina et fit de la tête une modeste dénégation :

— Je sais qu’elle en a dix mille meilleurs que moi ; mais, le maréchal de Saxe n’en avait pas beaucoup de pareils à ceux qui sont là, monseigneur le comte.

Il montrait les officiers, ses compagnons d’armes, qui causaient un peu plus loin.

VI.

C’étaient de vaillants hommes, brillants d’intelligence, distingués dans leurs manières, braves jusqu’à la témérité et tout pétillants de cette charmante gaieté qui sied si bien au soldat français.

La plupart d’entre eux portaient l’habit et le gilet chamarrés, les manchettes de dentelles, le chapeau, les bottes, la ceinture et la rapière de l’époque. C’était un martial costume qui convenait bien à de beaux et braves hommes ; leurs noms étaient familiers à toutes les maisons de la Nouvelle-France et plusieurs étaient aussi connus dans les colonies anglaises que dans les rues de Québec.

Là se trouvait le chevalier de Beaujeu, gentilhomme Normand qui s’était illustré sur les frontières, et qui, sept ans plus tard, couronnait, dans les forêts de la Monongahéla, une vie honorable par la mort d’un soldat. Il avait défait une armée dix fois plus nombreuse que la sienne et chassé, du champ de carnage où il tomba, l’infortuné Braddock.