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LE CHIEN D’OR

rures du temple de Bellone, et à crier avec plus de plaisir que jamais : Vive la guerre ! Vive la grande compagnie !

VI.

Bigot, dans son admirable perspicacité, prévoyait le cours des événements. Il devait, d’ailleurs, en rester à peu près le maître après la paix d’Aix-la-Chapelle : une paix qui n’en fut pas une du tout pour l’Amérique, mais fut plutôt une trêve armée et pleine de trouble entre les Français et les Anglais du Nouveau-Monde, dont les intérêts étaient opposés et les ambitions rivales.

La séance du bureau de direction de la grande compagnie fut levée. Bigot se retira, il était préoccupé ; il avait ses projets à lui, ses intérêts privés bien autrement importants à ses yeux que ceux de la compagnie. Cadet, Varin et Penisault, les âmes damnées de l’administration, avaient à farder certaines choses pour les rendre acceptables aux associés. Le cercle de la corruption était de plus en plus noir, à mesure qu’on avançait dans cette compagnie, au fond de laquelle Bigot, leur prince à tous, était assis comme sur un trône de ténèbres.

VII.

Le chevalier Des Meloises était fier de l’adresse et de la beauté de sa sœur, mais un peu inquiet à son sujet. Tous deux vivaient ensemble en parfaite harmonie tant qu’ils ne s’occupaient nullement l’un de l’autre. Ils vivaient au gré de leurs désirs. Seulement il y avait bisbille quand elle lui reprochait sa pénurie ou quand elle lui disait qu’il administrait les biens de la famille avec extravagance.

Il était content d’annoncer à Angélique qu’elle était actionnaire dans la grande compagnie, une bonne fortune qui lui arrivait par la grâce de l’Intendant. Angélique éprouva une immense joie. Les prodigalités de son frère ne l’inquiéteraient plus, et ses espérances extravagantes pourraient ouvrir leurs