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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/389

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le chien d’or

Le mai, planté devant la maison que l’on voulait honorer, devait rester debout jusqu’au retour de la fleuraison nouvelle. Plus tard, et tout dernièrement encore, les capitaines de la milice sédentaire étaient, dans nos paroisses paisibles, l’objet d’une semblable marque de déférence de la part de leurs soldats. En retour, les soldats étaient conviés à une bonne table, mangeaient, buvaient et s’amusaient bien. Ils tiraient autour du mai, en feu de peloton, les seuls coups de fusils que le village étonné entendit d’un bout de l’année à l’autre.

Maintenant cette fête caractéristique s’en va avec d’autres encore pour ne plus revenir sans doute. Elle aussi ne sera bientôt plus qu’un souvenir. La Saint Jean-Baptiste qui arrive avec les fleurs et les parfums des champs, avec des feuillages chargés d’harmonie et les flots de lumière du beau mois de juin, la Saint Jean-Baptiste qui est la fête de tous les canadiens-français, emporte et fait disparaître dans son orbe étincelant toutes ces autres réjouissances moins vives et moins douces qui n’ont pas pour fin sublime l’amour de la religion et de la patrie !

XIII.

Félix Beaudoin, ouvrant les bras comme pour chasser une volée d’oiseaux, repoussa les servantes dans la maison.

— Mon Dieu ! comme tout doit être en désordre ! pensa-t-il…

Il s’imaginait qu’en son absence le monde ne marchait plus. Les servantes auraient bien voulu regarder encore, mais il fallait obéir au sévère majordome sous peine d’exclusion perpétuelle.

Madame de Tilly, qui connaissait parfaitement le faible du vieillard, s’amusa dans le jardin avec les fleurs et les plantes, pour lui donner le temps de se mettre en règle, comme il disait.

Il entra à la suite des servantes, se revêtit promptement de sa livrée, prit son bâton blanc, signe