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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/97

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le chien d’or

— C’est bien ! remplissez tous vos coupes, et buvons à la santé, à la fortune, et à l’amour de la plus belle femme de l’heureuse France, la marquise de Pompadour !

— La Pompadour ! la Pompadour ! Ce nom retentit dans toute la salle, les coupes furent remplies jusqu’au bord et un tonnerre d’applaudissements et le choc joyeux des gobelets d’argent répondirent à la santé de la maîtresse de Louis XV. Elle était, cette favorite puissante, la protectrice de la grande compagnie, et c’était dans ses mains que tombait la plus grande part des profils réalisés par le monopole du commerce dans la Nouvelle-France.

VII.

Allons ! Varin ! c’est à votre tour, maintenant ! cria Bigot, en se tournant vers le commissaire. Une santé à Ville Marie ! Heureuse ville de Montréal où l’on mange comme des rats du Poitou, et où l’on boit jusqu’à ce que les gens sonnent l’alarme, comme firent les Bordelais, pour souhaiter la bienvenue aux percepteurs de la gabelle. Les Montréalais n’ont pas encore sonné l’alarme à votre sujet, Varin, mais cela ne saurait tarder.

D’une main peu sûre, Varin remplit sa coupe, jusqu’à ce qu’elle débordât, puis, s’appuyant sur la table il se leva et répondit :

— Une santé à Ville Marie ! et à nos amis dans l’indigence, les tuques bleues du Richelieu !

Il faisait allusion à une récente ordonnance de l’Intendant. Par cette ordonnance inique, Bigot enjoignait à Varin de saisir, sous prétexte d’approvisionner l’armée, mais en réalité au profit de la grande compagnie, tout le blé qui se trouvait dans les magasins de Montréal, et dans les campagnes voisines. On but avec enthousiasme.

— Bien pensé ! Varin ! reprit Bigot ; cette santé est au plaisir et au travail. Le travail ça été de brûler les granges des habitants ; le plaisir, c’est de boire à votre succès.