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Page:Kirby - Le chien d'or, tome II, trad LeMay, 1884.djvu/259

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LE CHIEN D’OR

communauté, pour servir et adorer le Seigneur, pour prier pour les autres et pour nous-mêmes.

— C’est un saint désir. Il faut ouvrir à ceux qui frappent, le Seigneur l’a dit. Attendez, je vais voir la mère Supérieure.

Elle s’éloigna pour revenir un instant après.

— La mère Supérieure a délégué ses pouvoirs à mère Esther, pour le moment, dit-elle.

Et elle fit lentement rouler sur ses gonds la porte lourde.

Les jeunes filles entrèrent dans une espèce d’antichambre au plancher fort luisant et meublée d’une table et de deux ou trois chaises.

Une religieuse, grande, digne, l’air doux, reçut avec bonté les deux postulantes qu’elle connaissait bien. Elle les reçut avec bonté, mais pas avec cette affectueuse bienveillance, cette expansive sensibilité des natures françaises.

La vénérable mère Esther était une fille d’Albion. Elle avait les qualités de sa race, savait parfaitement le français et aimait beaucoup la France. Elle était entrée dans le cloître à quinze ans. Elle y vécut trente-quatre ans, dans la prière et la paix.

V.

Mère Esther portait une longue robe noire retenue à la taille par une ceinture de cuir. Un bandeau blanc lui ceignait le front, et un voile noir tombait de chaque côté, sur ses épaules, cachant à demi la guimpe de neige qui lui couvrait la poitrine.

On ne voyait point ses cheveux coupés ras, suivant l’antique façon des couvents, car le Seigneur aime le sacrifice des beautés qu’il a créées.

Les religieuses ne laissent plus croître jamais les tresses soyeuses de leur chevelure tombée sous les ciseaux, le jour de leur consécration. Pourquoi ? Par mortification, sans doute, et pour se dépouiller de ce qui faisait leur puissance et leur grâce aux yeux des hommes.