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le chien d’or

Madame de Tilly fut inconsolable. Elle regardait Pierre comme son fils et voulait le faire son héritier dès qu’il aurait épousé Amélie.

Elle voulut lui donner son immense fortune, non seulement comme un témoignage de la haute estime qu’elle avait pour lui, mais aussi comme compensation pour les dommages, que lui causerait la mort de son père.

II refusa le royal héritage.

— C’était pour elle que je voulais des richesses, fit-il ; maintenant qu’elle n’est plus, je n’ai besoin de rien. Je retourne en Europe mettre de nouveau mon épée au service de mon roi. Je ne chercherai point la mort, mais ne la fuirai point non plus. Il me tarde d’aller rejoindre au ciel ma fiancée…

— Ô mon Dieu ! s’écriait souvent madame de Tilly, comme la ruine de notre félicité est profonde !

Le père de Berey lui répliquait tout en partageant sa sombre désespérance.

— La raison ne saurait seule comprendre ou expliquer les voies de Dieu, et l’homme est un pauvre aveugle que la foi guide sûrement. Le juste est souvent éprouvé et le méchant triomphe ; mais ce n’est que pour un temps. La fin du juste est douce et calme, la mort de l’impie sera éternelle !

Il avait perdu sa gaieté habituelle, le bon religieux, et il gémissait sur les afflictions de ses amis.

Après la conquête, madame de Tilly donna une partie de ses biens aux Ursulines et se retira en France, dans la vieille Normandie, où fleurit encore un rameau de son illustre famille.

III.

Le printemps qui suivit la mort d’Amélie, Pierre Philibert dit un éternel adieu à la terre natale et s’en fut prendre du service dans l’armée. Il se distingua maintes fois par sa valeur et son courage, et vint enfin tomber en héros sur le champ de bataille de Minden.

La mort du bourgeois fut le signal de la défaite