Page:Klapka - Trois Hommes en Allemagne, traduction Seligmann, 1922.djvu/102

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robe d’alpaga gris râpée et tachée d’encre. Un jour passé à Ascot ou ailleurs au grand air aurait peut-être un peu coloré ses joues pâles.

Notre directeur, l’homme le plus effrontément ignare qu’on pût rencontrer, écrivait, en puisant dans une encyclopédie à bon marché, les pages dédiées aux « Informations Générales » et s’en tirait en somme très bien ; pendant ce temps notre groom, assisté d’une excellente paire de ciseaux, collaborait à notre rubrique « Mots d’esprit ».

On travaillait dur et l’on était peu payé ; ce qui nous soutenait était la conscience que nous avions d’instruire et d’aider nos concitoyens. Le jeu le plus répandu, le plus éternellement et universellement populaire est de jouer à l’école. Réunissez six enfants, faites-les asseoir sur les marches d’un perron et promenez-vous devant eux, en tenant à la main un livre et une canne. Nous jouions à cela étant enfants, nous y jouons grands garçons et fillettes, nous y jouons hommes et femmes ; nous y jouerons encore, quand chancelants et penchés, nous nous acheminerons vers la dernière demeure. Jamais nous ne nous en lassons, jamais cela ne nous ennuie. Une seule chose nous contrarie : c’est la tendance qu’ont les six enfants à se lever à tour de rôle pour prendre en main livre et canne. Je suis sûr que la vogue du métier de journaliste, malgré ses nombreux déboires, réside dans le fait suivant : chaque journaliste croit être celui qui doit aller et venir, le livre et la canne à la main.