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Page:Klapka - Trois Hommes en Allemagne, traduction Seligmann, 1922.djvu/275

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droits s’entrechoquent. Il n’y a ni animation, ni adresse, ni élégance dans le jeu (je parle d’après mes propres impressions). Le plus fort est vainqueur ; c’est celui, dont le bras emmailloté peut tenir le plus longtemps sans trop faiblir ce grand sabre mastoc, soit pour parer, soit pour frapper.

Tout l’intérêt réside dans le spectacle des blessures. Elles apparaissent presque toujours aux mêmes endroits, — sur le sommet de la tête ou sur la partie gauche de la face. Parfois une portion de cuir chevelu ou un morceau de joue vole à travers les airs, pour être ramassé et conservé soigneusement par son propriétaire ou, plus exactement, par son ancien propriétaire qui, orgueilleusement, lui fera faire le tour de la table lors des joyeux festins à venir ; et naturellement le sang coule à flots de chaque blessure. Il inonde les docteurs, les seconds, les spectateurs ; il asperge le plafond et les murs ; il sature les combattants et forme des mares dans la sciure. À la fin de chaque assaut, les docteurs accourent et, de leurs mains déjà dégouttantes de sang, compriment les plaies béantes, les épongent avec de petits tampons d’ouate mouillée qu’un aide tend sur un plateau. Naturellement, dès que l’homme se relève et reprend sa besogne, le sang jaillit de nouveau, l’aveuglant à moitié et mettant sur le plancher une glu où le pied glisse. Parfois on voit les dents d’un homme découvertes jusqu’à l’oreille, ce qui fait, que tout le reste du duel il sourit démesurément à la moitié des specta-