Page:Klapka - Trois Hommes en Allemagne, traduction Seligmann, 1922.djvu/60

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Ebbsen dit que pour l’instant cela ferait l’affaire.

Il semblait se fatiguer. Si je l’avais laissé faire, il serait probablement rentré chez lui. Mais j’avais la ferme intention de le retenir et de lui faire finir son travail ; j’avais abandonné toute idée de promenade. Il était arrivé à annihiler en moi tout l’orgueil que me causait ma machine. Tout ce qui pouvait encore m’intéresser, c’était de le voir trimer, de le voir s’égratigner, se cogner, se pincer. Je ranimai ses esprits défaillants avec un verre de bière et quelques compliments judicieux. Je lui dis :

— Je m’instruis véritablement en vous regardant faire. Ce n’est pas seulement votre adresse, votre activité, qui me réconfortent et me fascinent : c’est encore la constatation de la confiance sereine que vous avez en vous et le bon espoir inexpliquable- que vous gardez.

Ainsi encouragé, il s’appliqua à replacer l’engrenage. Il appuya la bicyclette contre la maison et travailla un côté. Puis l’appuya contre un arbre et travailla le côté opposé. Puis, je la tins pour lui, pendant qu’il était allongé par terre, la tête entre les roues, travaillant d’en bas, l’huile s’égouttant sur lui. Enfin il m’enleva la machine et s’inclina sur elle, plié comme une besace vide, perdit pied, glissa et tomba sur la tête. Par trois fois il dit :

— Dieu merci ! le voilà enfin en place.

Par deux fois il jura :