Page:Klaproth - Tableaux historiques de l'Asie, 1826.djvu/229

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ses troupes. Les états des Goei, qui depuis plusieurs années n'avaient point eu la guerre avec ceux de Chou , ne s'attendant pas en être attaqués, n'étaient point en état de défense. Tchu kouo liang, ministre et général de l'empereur des Chou han, partit brusquement avec une grande armée pour tomber sur eux au dépourvu ; il jeta, en effet, une si grande terreur sur son passage, qu'il soumit plusieurs cantons sans la moindre résistance. Cependant le prince des Goei envoya à sa rencontre le fameux général Szu ma y. Cet habile guerrier mit des garnisons dans toutes les villes qui étaient le plus exposées, et, ne voulant pas risquer le sort d'une bataille, quelque artifice que pût employer son ennemi pour l'y engager, il s'enferma dans un camp, qu'il étendit le plus qu'il fut possible. Tchu kouo liang se vit alors contraint de camper aussi; mais il se trouvait dans un pays où il ne lui était pas aisé d'avoir des vivres, car le plan de Szu ma y était de laisser les troupes de l'ennemi se consumer d'elles-mêmes ; Szu ma y évita donc toujours d'jen venir aux mains, malgré l'ardeur dont les siens étaient animés pour combattre, malgré les reproches et les chansons satiriques qu'on faisait contre lui dans son propre camp, malgré toutes les ruses de Tchu kouo liang, qui le provoqua, qui l'instdta, jusqu'à lui envoyer des habits de femme; il resta inébranlable. Il ne voulut pas, pour un point d'honneur mal entendu, sacrifier les intérêts de son prince, ni perdre de vue la véritable gloire attachée au succès. Ce qu'il avait prévu arriva en partie: la disette, les défections , et les maladies, ayant épuisé l'armée des Chou han, Tchu kouo liang fut enfin forcé de se retirer. Ce grand général étant tombé malade, sentit qu'il n'en reviendrait pas : il ordonna à son successeur dans le commandement de se préparer à la retraite aussitôt qu'il aurait fermé les yeux. A peine avait-il cessé de vivre, que celui-ci, faisant défiler les troupes, mit à l'arrière-garde les étendards particuliers de Tchu kouo liang, pour faire croire que ce général vivait encore. Cependant le bruit de sa mort s'était répandu avec rapidité, et Szu ma y ne fut pas des derniers à en être instruit. Alors il sortit de son camp pour harceler les ennemis, changer leur retraite en fuite, ou leur livrer bataille s'ils voulaient l'accepter. Mais, dès qu'il aperçut les étendards de son adversaire, il crut avoir été la dupe d'un bruit que celui-ci aurait fait courir pour l'engager à en venir aux mains. Dans cette persuasion, il retourna sur ses pas, et l'armée ennemie fit tranquillement sa retraite. Cet événement eut lieu en 234 de J.-C.