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Page:Kostomarov - Deux nationalités russes.djvu/16

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III

Les vieilles idées slavonnes sur l’organisation sociale reconnaissaient, comme source du droit public : la volonté des peuples, le verdict du Vetché (ou États généraux). Quel que fût ce peuple et de quelque façon que se réunît le Vetché selon les circonstances, ces circonstances élargissaient ou rétrécissaient le cercle de ceux qui y prenaient part, lui donnaient la signification d’assemblée générale du peuple (landsgemeinde) ou bien la limitaient à une foule de favorisés du sort. En même temps, depuis longtemps était née et s’était enracinée l’idée d’un prince gouverneur, arbitre et restaurateur de l’ordre, défenseur contre les troubles intérieurs et extérieurs. Naturellement les principes du Vetché et l’idée du prince étaient contradictoires, mais cette contradiction était écartée par la reconnaissance de la volonté du peuple dans le Vetché présidé par le prince.

Un prince était indispensable, mais il était électif et pouvait être exilé s’il ne satisfaisait pas aux exigences du peuple.

Au XIe, XIIe et XIIIe siècles, ce principe régnait partout, à Kief et Novgorod, à Polotsk, à Rostoff et à Halitch. Son apparition correspondait avec diverses circonstances historiques et avec des conditions intérieures auxquelles était soumis le sort de la Russie.

Ce principe prenait tantôt un esprit gouvernemental, tantôt un esprit plus populaire. Dans certains pays, le prince était toujours choisi dans une certaine famille et cela finissait par être une sorte d’hérédité ; si ce droit ne devint pas absolument héréditaire, c’est qu’il ne réussit pas entièrement à supprimer l’élection qui, par son existence, modérait la coutume infaillible ; dans d’autres — à Novgorod — à l’élection du prince, on n’observait aucune règle de succession, excepté la nécessité du moment. À Kief il serait vain de chercher aucun droit fixe, aucune règle pour la succession du prince.

Il existait, il est vrai, une idée confuse du droit d’aînesse, mais le droit populaire d’élection était au-dessus de cette idée. Iziaslaf-Yaroslavitch fut banni par les Kievains, ceux-ci élurent un prince de Polotsk qui était par hasard enfermé dans les prisons