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DEUX NATIONALITÉS RUSSES[1]



Il est incontestable que la situation géographique fut la première cause des différences entre les nationalités en général. Plus un peuple occupe un degré inférieur dans la civilisation, plus les circonstances géographiques aident à lui donner un type spécial. Les peuples qui n’ont pas de principes fixes, se transportent facilement, émigrent d’un pays à un autre, car ils ont bien peu de liens qui les attachent à leurs anciennes demeures. Après avoir émigré et s’être fixés dans de nouveaux lieux, ces peuples nomades se transforment facilement et ne tardent pas à changer de mœurs, en prenant le caractère naturel du nouveau pays. La résistance sera d’autant moins importante que les moyens de support feront plus défaut.

Il en est tout autrement pour un peuple qui, dans ses premières demeures, s’est acquis tout ce qui pouvait le satisfaire et ce qui lui paraissait utile ou sacré. Un tel peuple, en émigrant dans de nouveaux territoires, y transporte ses pénates, ses principes, qui lui deviennent des supports lorsque les circonstances de la nou-

  1. Sous ce titre un peu ironique, Kostomaroff publia cet opuscule pour établir la différence entre les Russes et les Ukraniens. Un peu vieilli, ce travail exigerait une mise au point conformément aux derniers résultats des études historiques ; malgré cela, c’est une œuvre très intéressante et, jusqu’à aujourd’hui, unique sur ce sujet.

    Michel Kostomaroff (1817-1885), fils d’un seigneur, étudiant à l’Université de Charkov, était professeur de gymnase, plus tard professeur à l’Université de Kiev. Comme un des membres de la société de Cyrille et Methodius, il fut emprisonné (comme Chevtchenko, Koulich, etc.) et déporté à Saratov. Après l’amnistie (Alexandre II), il voyagea en Europe, devint plus tard professeur d’histoire à l’Université de Pétersbourg et y fonda la Revue ukranienne Osnova. Ses œuvres littéraires n’ont que peu de valeur ; par contre, comme historien, il s’est acquis une grande gloire. Ses œuvres historiques (20 volumes) ont toutes trait à l’Ukraine.

    Cette traduction est faite sur l’édition de Tarnopol, 1886, et celle de Lemberg, 1906.