Page:Kouprine - Sulamite.djvu/8

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nées et poursuivie malgré les vicissitudes de la guerre et de la révolution, est nombreuse et, semble-t-il, d’une grande variété de tons, richement nuancée du réalisme psychologique à l’imagination poétique. Cependant la nouvelle dont on a bien voulu me confier la présentation au public français apparaît exceptionnelle dans la série des ouvrages de son auteur. C’est un « accident » au sens où l’on prend ce terme dans la cuisson d’une belle poterie émaillée où les libres magies du feu interviennent par un caprice dont le résultat est somptueux autant qu’imprévu. Sulamite est tout à fait une fantaisie d’artiste se dérobant à l’étude des caractères modernes pour se donner le plaisir d’un savoureux morceau de peinture, d’une recherche du style intensément coloré en marge d’une œuvre grave et monochrome. On a peine à croire que l’aquafortiste puissant du Duel ait pu être l’enlumineur orientaliste, éclatant et subtil de Sulamite. Il y faut une surprenante souplesse : mais c’est là une des grâces du génie russe.

On a pu dire de ce court roman qu’il était une des rares œuvres russes se ressentant de l’influence de Flaubert. À la vérité, je songerais plutôt à la manière du Théophile Gautier de la Chaîne d’Or et du Roman de la Momie. Du moins, ignorant la langue origi-