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lis, peut aller jusqu’à compenser et au delà toute sensation de douleur ; 2o La « servitude sexuelle » produisant dans la vie psychique des phénomènes qui en eux-mêmes ne sont pas de nature perverse, peut, dans des conditions pathologiques, devenir un besoin de soumission morbide s’accompagnant de sensations de plaisir, ce qui – quand même l’hypothèse d’une hérédité maternelle serait laissée de côté – indique une dégénérescence pathologique de l’instinct physiologique de soumission qui caractérise la femme.

De même, pour expliquer le sadisme, on trouve deux éléments constitutifs dont l’origine peut être ramenée jusque dans le domaine physiologique : 1o Dans la passion sexuelle, il peut se produire une sorte d’émotion psychique, un penchant à agir sur l’objet aimé de la façon la plus forte possible ce qui, chez des individus sexuellement hyperesthésiés, peut devenir une envie de causer de la douleur ; 2o Le rôle actif de l’homme, la nécessité de conquérir la femme, peuvent, dans des circonstances pathologiques données, se transformer en désir d’obtenir d’elle une soumission illimitée.

Ainsi le masochisme et le sadisme se présentent comme la contre-partie complète l’un de l’autre. Ce qui corrobore ce fait, c’est que, pour les individus atteints de l’une ou de l’autre de ces deux perversions, l’idéal est toujours une perversion opposée à la leur et qui se manifesterait chez une personne de l’autre sexe. Comme exemples à l’appui, il suffit de citer les observations 44 et 49 ainsi que les Confessions de Rousseau.

La comparaison du masochisme et du sadisme peut encore servir à écarter complètement cette hypothèse que le masochisme tirerait son origine primitive de l’effet réflexe de la flagellation passive, et que tout le reste ne serait que le produit d’associations d’idées se rattachant au souvenir de la flagellation, ainsi que l’a soutenu Binet dans son explication du cas de Jean-Jacques Rousseau et ainsi que Rousseau lui-même l’a cru. De même la torture active qui, pour le sadiste,